Une matinée d’ivresse !
Quelle belle idée ! Mais qu’est-ce donc qui va bien pouvoir nous rendre ivres à une heure si matinale ? Les restes des songes de la nuit que l’on mêlera aux lueurs venues de l’aube ? La pureté de la première lumière jetée sur le monde ? La fraîcheur de l’air et des dalles sous nos pieds ? Le silence et les mille bruits des choses endormies ? Le sentiment d’exister pleinement, et d’en déborder ?
Les poètes en général, et Rimbaud tout particulièrement sont des experts en ivresse. Ils savent transformer le banal, l’inaperçu, l’indifférent en une fête, donnée en la demeure des dieux.
Il est bien évident que tout ne sort pas complètement armé de leur imagination, et Rimbaud aura bien sûr trouvé le modèle de son poème dans les récits alors en vogue qu’étaient les Séances de Haschisch. Mais ce qui est frappant dans son cas est que le “poison” ne passera pas, et que nous ne serons pas “rendus à l’ancienne inharmonie”. Il y a dans l’ivresse une promesse quasi-religieuse en laquelle Rimbaud met toute sa foi.
Fumisterie toxicomane ou saisie véritable de l’Etre ? Doit-on suivre le guide, ou le laisser tituber puis tomber ?
René Char, autre poète, et grand admirateur du premier a sa réponse :
“Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud ! Nous sommes quelques-uns à croire sans preuve le bonheur possible avec toi.”
Bon visionnage :
Pour ceux d’entre vous qui sont intéressés par le thème de l’ivresse en poésie, je vous renvoie à l’article rempli de conseils de lecture que j’avais écrit auparavant : L’ivresse en poésie.